Recevoir un courrier ou un SMS d’une agence de recouvrement comme Credit Bureau Associates soulève immédiatement des questions : cette dette est-elle réelle ? Qui encaisse le paiement ? Dois-je payer des frais supplémentaires ? Le recouvrement de créances obéit à des règles strictes en France, et comprendre le modèle économique de l’agence (mandat ou rachat) ainsi que vos droits évite les erreurs coûteuses et les arnaques.
L’essentiel à retenir
- ✨ Agence de recouvrement : soit mandataire (agit pour le créancier), soit cessionnaire (a racheté la créance et agit pour son compte)
- ✨ Phase amiable en France : lettre de mise en demeure conforme, pas de frais au débiteur (article L.111-8 CPCE)
- ✨ Avant de payer : vérifier identité, créancier d’origine, titre, décompte détaillé ; éviter les liens SMS non vérifiés
- ✨ Prescription : délai général 5 ans, interrompu par assignation, injonction, reconnaissance de dette ou paiement partiel
Achat de créances vs mandat : ce que cela change pour vous
Le modèle économique de l’agence de recouvrement détermine qui est le créancier réel, qui encaisse le paiement et quels documents vous devez exiger.
| Critère | Mandat (recouvrement pour compte d’autrui) | Cession (rachat de créances) |
|---|---|---|
| Qui est le créancier | Le créancier d’origine reste propriétaire de la créance (opérateur, banque, entreprise) | L’agence de recouvrement est devenue propriétaire de la créance par rachat |
| Qui encaisse le paiement | L’agence encaisse puis reverse les fonds au créancier d’origine, moins sa commission | L’agence encaisse directement pour son propre compte |
| Documents à exiger | Contrat de mandat entre créancier d’origine et agence, historique détaillé de la créance, décompte avec fondement juridique | Contrat de cession de créances (acte de cession), historique complet de la dette initiale, décompte actualisé |
| Réglementation applicable | Règles strictes du recouvrement amiable (mentions obligatoires, frais à la charge du créancier L.111-8 CPCE) | Réglementation du recouvrement amiable moins stricte, mais obligation de prouver la cession et l’existence de la créance initiale |
| Possibilité de négociation | Négociation possible avec l’agence, mais décision finale du créancier d’origine | Négociation directe avec l’agence, qui a intérêt à récupérer au moins une partie du montant investi |
| Impact sur vos droits | Vous conservez tous vos droits vis-à-vis du créancier d’origine (contestation, prescription, exceptions) | Vous conservez tous vos droits vis-à-vis du créancier cessionnaire (contestation, prescription), mais plus de lien avec le créancier d’origine |
Comment identifier le modèle
Le courrier de relance doit mentionner clairement si l’agence agit pour le compte de (mandat) ou en son nom propre (cession). En cas de cession, exigez une copie du contrat de cession et la preuve que le créancier d’origine a bien vendu la créance. Contactez le créancier d’origine pour confirmer la cession et vérifier qu’il ne cherche plus à recouvrer la même dette.
Recouvrement amiable en France : cadre, obligations et limites
La phase amiable du recouvrement précède toute action judiciaire. En France, elle est strictement encadrée par le Code des procédures civiles d’exécution (CPCE).
📋 Mentions obligatoires de la mise en demeure
Tout courrier de recouvrement amiable doit comporter les mentions suivantes sous peine de nullité :
- Nom et coordonnées de la personne chargée du recouvrement (agence, cabinet, commissaire de justice)
- Nom et coordonnées du créancier d’origine
- Montant de la somme due avec distinction claire : montant principal, intérêts, autres accessoires
- Indication que la somme doit être payée avec précision des modalités de paiement
- Mention L.111-8 CPCE : « Les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s’ils concernent un acte dont l’accomplissement est prescrit par la loi »
Interdiction des pratiques agressives
Les pratiques suivantes sont strictement interdites en phase amiable :
- Menaces ou intimidations : prétendre engager une procédure judiciaire sans intention réelle, menacer de saisie sans titre exécutoire
- Harcèlement : relances abusives ou répétées (plusieurs appels par jour, SMS incessants)
- Diffusion d’informations confidentielles : divulguer la situation financière du débiteur à des tiers (proches, collègues, voisins)
- Visite au domicile ou sur le lieu de travail sans titre exécutoire (seul un commissaire de justice avec titre peut se présenter)
Frais amiables à la charge du créancier (L.111-8 CPCE)
L’article L.111-8 du Code des procédures civiles d’exécution est formel : les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier. Toute clause contraire est réputée non écrite. Si l’agence vous facture des frais de recouvrement amiable, refusez fermement ce paiement par courrier recommandé en citant cet article.
Quand basculer en judiciaire
Si le débiteur ne paie pas malgré la mise en demeure, le créancier peut engager une action judiciaire pour obtenir un titre exécutoire : injonction de payer, assignation devant tribunal, procédure simplifiée de recouvrement des petites créances (moins de 5 000 €). Une fois le titre exécutoire obtenu, les frais d’exécution forcée deviennent alors à la charge du débiteur.
Comment négocier efficacement
Négocier un plan d’apurement :
- Reconnaître la dette si elle est fondée, mais demander un étalement du paiement sur 6, 12 ou 24 mois selon votre capacité
- Proposer un paiement partiel immédiat (20-30 % du montant total) en échange d’une remise sur le solde
- Demander l’abandon des intérêts de retard si le montant principal est intégralement payé
- Exiger un écrit formalisant l’accord : montant retenu, échéancier, remise accordée, engagement de non-poursuite
- Conserver toutes les preuves de paiement (virements, chèques encaissés, reçus) et de correspondance
Prescription et « réactivation » d’un dossier : délais et interruptions
La prescription éteint l’action en justice du créancier passé un certain délai. Comprendre ces délais et les actes qui les interrompent protège contre des réclamations illégitimes.
Délais usuels de prescription
Le délai de prescription de droit commun est de 5 ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action. Pour une créance contractuelle (facture impayée, prêt), le point de départ est généralement la date d’exigibilité de la dette (date d’échéance de la facture, fin du délai de paiement convenu).
Certaines créances obéissent à des délais spécifiques : 2 ans pour les contrats de consommation courante (électricité, gaz, téléphonie), 1 an pour les amendes contraventionnelles.
Actes interruptifs de prescription
La prescription peut être interrompue par plusieurs actes, ce qui fait repartir le délai à zéro :
- Assignation en justice : dépôt d’une requête devant tribunal, même si elle est ultérieurement rejetée
- Injonction de payer : demande d’injonction de payer auprès du tribunal compétent
- Acte d’exécution forcée : commandement de payer, saisie, signification d’un titre exécutoire
- Reconnaissance de dette par le débiteur : tout écrit ou déclaration reconnaissant expressément devoir la somme (lettre, email, SMS)
- Paiement partiel : tout versement, même symbolique, reconnaît implicitement l’existence de la dette et interrompt la prescription
Prudence avec reconnaissance de dette et paiements partiels
Avant de reconnaître une dette prescrite ou d’effectuer un paiement partiel, vérifiez systématiquement si la prescription est acquise. Une reconnaissance ou un paiement même minime fait repartir le délai de 5 ans à zéro, permettant au créancier de relancer l’intégralité de la procédure.
⚠️ Erreurs fréquentes à éviter
- Payer un acompte sur une dette prescrite sans vérifier la date d’exigibilité initiale
- Répondre par écrit en reconnaissant la dette alors qu’elle est prescrite
- Accepter un plan d’apurement proposé par l’agence sans avoir vérifié la prescription
- Considérer qu’une simple relance ou mise en demeure interrompt la prescription (seuls les actes judiciaires ou la reconnaissance interrompent)
- Oublier de compter les éventuelles interruptions antérieures (assignations, reconnaissances précédentes)
Frise chronologique textuelle
Année 0 : Date d’exigibilité de la dette (facture échue, prêt non remboursé)
Année 0 + 6 mois : Première mise en demeure amiable (n’interrompt pas la prescription)
Année 2 : Assignation en justice par le créancier → interruption de prescription, délai repart à zéro
Année 2 + 5 ans : Nouvelle prescription si aucune autre interruption
Année 4 : Reconnaissance de dette écrite du débiteur → interruption, délai repart à zéro
Année 4 + 5 ans : Prescription définitive si aucune autre interruption
Checklists anti-fraude et de vérification (avant de payer)
Avant tout paiement à une agence de recouvrement, effectuez ces vérifications essentielles pour sécuriser votre démarche.
✅ Checklist de vérification de l’entité
- Mentions légales : vérifiez que le site web ou le courrier comporte raison sociale, adresse complète, SIREN/RCS
- SIREN/RCS : recherchez l’agence sur societe.com ou infogreffe.fr pour confirmer l’existence juridique et l’activité déclarée
- Coordonnées officielles : ne rappelez jamais le numéro indiqué dans un SMS ou email ; recherchez les coordonnées sur le site officiel de l’agence
- Pas de lien court : refusez tout paiement via un lien raccourci (bit.ly, tinyurl) reçu par SMS ou email non vérifié
- Appel via numéro officiel : contactez l’agence via le numéro trouvé sur son site internet officiel ou sur des annuaires professionnels
📋 Checklist des pièces à exiger
- Contrat initial : copie du contrat, de la facture ou du document prouvant l’existence de la dette initiale
- Relevé détaillé : décompte actualisé précisant montant principal, intérêts, frais (avec fondement juridique de chaque poste)
- Cession ou mandat : si cession, copie du contrat de cession signé ; si mandat, copie du contrat de mandat entre créancier et agence
- Confirmation créancier d’origine : contactez directement le créancier d’origine pour confirmer l’existence de la dette et la transmission à l’agence
- Titre exécutoire : si l’agence prétend avoir un titre exécutoire, exigez la copie du jugement, de l’ordonnance d’injonction de payer ou du titre
En cas d’amiable : refuser les frais de recouvrement mis à charge
Si l’agence facture des frais de recouvrement amiable (frais de dossier, honoraires), utilisez ce modèle de réponse :
Objet : Refus de paiement des frais de recouvrement amiable – Article L.111-8 CPCE
Madame, Monsieur,
Par courrier du [date], vous me réclamez le paiement d’une somme de [montant total] incluant [montant frais] de frais de recouvrement amiable.
Je vous rappelle que l’article L.111-8 du Code des procédures civiles d’exécution dispose expressément : « Les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. »
En conséquence, je refuse formellement le paiement de ces frais et vous demande de rectifier votre demande en ne réclamant que le montant principal de la dette, soit [montant dette seule].
Cordialement,
[Signature]
En cas de pression ou menaces : conserver preuves et signaler
- Conservez tous les courriers, emails et SMS comme preuves des pratiques abusives
- Enregistrez les appels (avec avertissement préalable) ou notez l’heure, la durée et le contenu des conversations
- Signalez à la DGCCRF via signal.conso.gouv.fr si l’agence utilise des pratiques commerciales trompeuses ou agressives
- Contactez une association de consommateurs (UFC-Que Choisir, CLCV) pour obtenir un accompagnement juridique
Pour les créanciers : « réactiver » un recouvrement sans risque juridique
Les créanciers souhaitant relancer le recouvrement d’une créance ancienne doivent suivre une méthodologie rigoureuse pour éviter les erreurs juridiques coûteuses.
1. Audit de preuves
Rassemblez tous les documents prouvant l’existence et l’exigibilité de la créance : contrat signé, factures, bons de livraison, emails de relance, accusés de réception. Vérifiez que la créance est certaine, liquide et exigible : montant déterminé, échéance passée, absence de contestation fondée.
2. Mise en demeure conforme
Rédigez une mise en demeure respectant toutes les mentions obligatoires (article R.124-4 CPCE) : identité créancier et agence, montant détaillé, indication de paiement, mention L.111-8 sur les frais. Envoyez par courrier recommandé avec accusé de réception pour traçabilité et preuve de réception.
3. Traçabilité des relances
Documentez chaque relance : date, canal (courrier, email, appel), contenu, réponse du débiteur. Cette traçabilité prouve la bonne foi du créancier et permet de démontrer les démarches amiables entreprises en cas de contentieux ultérieur.
4. Choix agence ou commissaire de justice
Si le recouvrement amiable échoue, confiez le dossier à une agence de recouvrement (mandat rémunéré au résultat) ou à un commissaire de justice (recouvrement amiable puis judiciaire). Le commissaire de justice dispose d’un monopole pour l’exécution forcée et inspire souvent plus de sérieux auprès du débiteur.
5. Bascule judiciaire : injonction de payer
Si le débiteur ne paie pas malgré les relances, engagez une procédure d’injonction de payer auprès du tribunal compétent. Joignez tous les justificatifs (contrat, factures, mises en demeure). Le juge statue sans contradictoire et délivre une ordonnance d’injonction de payer que le commissaire de justice signifie au débiteur. Le débiteur dispose d’1 mois pour former opposition. Passé ce délai sans opposition, l’ordonnance devient exécutoire.
6. Suivi post-titre : saisies possibles
Une fois le titre exécutoire obtenu, le commissaire de justice peut procéder à des mesures d’exécution forcée : saisie-attribution sur compte bancaire, saisie sur salaires, saisie-vente de biens meubles. Ces mesures sont encadrées par la loi et doivent respecter les plafonds de saisissabilité et les biens insaisissables.
7. Respect RGPD et pratiques loyales
Traitez les données personnelles du débiteur conformément au RGPD : collecte limitée aux données nécessaires, information du débiteur sur ses droits (accès, rectification, suppression), sécurisation des données, conservation limitée dans le temps. Interdisez toute pratique agressive : harcèlement, menaces, diffusion d’informations confidentielles à des tiers.
FAQ
Une agence peut-elle me facturer des frais en recouvrement amiable ?
Non. L’article L.111-8 du Code des procédures civiles d’exécution est formel : les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier. Toute clause contraire est réputée non écrite. Seuls les frais d’exécution forcée (après obtention d’un titre exécutoire comme une ordonnance d’injonction de payer ou un jugement) peuvent être mis à la charge du débiteur. Si une agence vous facture des frais de recouvrement amiable, refusez ce paiement par courrier recommandé en citant expressément l’article L.111-8 CPCE. Vous pouvez également signaler cette pratique à la DGCCRF via signal.conso.gouv.fr. En revanche, si l’agence dispose d’un titre exécutoire et engage des mesures d’exécution forcée (commandement de payer, saisie), les frais de ces actes sont légalement à votre charge.
Comment vérifier qu’une dette cédée est réelle avant de payer ?
Lorsqu’une agence prétend avoir racheté votre dette, effectuez ces vérifications avant tout paiement : (1) Exigez une copie du contrat de cession de créances signé entre le créancier d’origine et l’agence, mentionnant votre nom et le montant de la dette. (2) Demandez une copie du contrat initial ou de la facture prouvant l’existence de la dette d’origine. (3) Contactez directement le créancier d’origine via ses coordonnées officielles pour confirmer qu’il a bien vendu la créance et qu’il ne cherche plus à la recouvrer. (4) Vérifiez l’identité de l’agence via son SIREN/RCS sur societe.com ou infogreffe.fr. (5) Exigez un décompte détaillé actualisé précisant montant principal, intérêts et date d’exigibilité. (6) Vérifiez la prescription : si la dette a plus de 5 ans sans interruption, elle est prescrite et non exigible. Ne payez jamais via un lien court reçu par SMS ou email sans avoir effectué toutes ces vérifications.
J’ai reçu un SMS de paiement : que faire pour éviter une arnaque ?
Ne cliquez jamais sur un lien de paiement reçu par SMS sans vérifications préalables. Les arnaques au faux recouvrement se multiplient. Voici la marche à suivre : (1) Ne rappelez pas le numéro indiqué dans le SMS (souvent un numéro court 36XXX ou 38XXX). (2) Recherchez les coordonnées officielles de l’agence mentionnée via Google ou un annuaire professionnel. (3) Appelez l’agence via ce numéro officiel pour confirmer l’existence du dossier en fournissant votre nom et la référence du SMS. (4) Vérifiez le SIREN/RCS de l’agence sur societe.com. (5) Contactez le créancier d’origine mentionné (opérateur, banque) pour confirmer qu’il a bien confié le dossier à cette agence. (6) Exigez l’envoi d’un courrier recommandé avec tous les justificatifs (contrat, facture, décompte). (7) Signalez le SMS suspect sur signal-spam.fr ou cybermalveillance.gouv.fr si vous suspectez une arnaque. Ne communiquez jamais vos coordonnées bancaires par téléphone ou SMS.
Face au recouvrement de créances, connaître vos droits et vérifier systématiquement l’authenticité des demandes transforme le stress en action maîtrisée. Les règles françaises protègent les débiteurs contre les abus tout en permettant aux créanciers de recouvrer légitimement leurs créances.
